lundi 6 janvier 2014

Italie, Lettonie : ces peuples qui rejettent l’euro


Les partisans de l’UE se sont réjouis de l’arrivée de la Lettonie comme 18ème membre de la zone euro. Mais tout ceci ressemble à une machine folle qui s’emballe quand on sait que 60% de la population y était opposée. Cela craque aussi en Italie, où une majorité souhaite désormais le retour de la lire.


Le scandale letton

Certes, en liant sa monnaie à l’euro, le gouvernement avait de facto déjà abandonné toute souveraineté monétaire, expérimentant avant la Grèce l’horreur des politiques d’ajustements structurelles où l’on fait baisser les salaires plutôt que la monnaie pour regagner en compétitivité. Mais cela avait été un tout petit peu moins violent qu’en Grèce dans la mesure où le pays avait connu une très forte croissance dans les années précédentes. Mais l’abandon du lats et le passage à l’euro au 1er janvier se sont faits d’une manière particulièrement choquante d’un point de vue démocratique.

En effet, comme cela était rapporté en juillet 2013, le gouvernement a refusé un référendum à son peuple sur le passage à la monnaie unique européenne ! Il est tout de même assez culotté de la part d’un Etat d’abandonner la monnaie nationale sans demander l’avis de sa population, qui n’était alors que 38% à le souhaiter. Le ministre des finances espérait que ce chiffre progresserait d’ici la fin de l’année. Mais les nouveaux sondages montrent l’exact inverse puisque seulement 20% des lettons se réjouissent de ce choix aujourd’hui et 60% ne s’en réjouissent. L’UE et la démocratie, cela fait 2.

En Italie, le divorce avec l’idée européenne progresse

Alors que le débat français demeure toujours aussi caricatural sur l’euro, ce débat progresse partout ailleurs en Europe. L’Allemagne a toujours été en pointe, ayant gardé une nostalgie du deutsche mark. Mais c’est maintenant dans les pays du Sud, longtemps des défenseurs acharnés de la cause européenne, que la remise en question progresse le plus vite. Il y a quelques mois, c’était le livre d’un économiste portugais favorable au retour de l’escudo qui s’imposait en tête des ventes. Aujourd’hui, un sondage révèle qu’une majorité d’Italiens (49% contre 44%) souhaitent le retour de la lire.

Après des élections législatives marquées par la réussite des partis critiques à l’égard de l’UE, tout ceci montre l’évolution rapide du débat public de l’autre côté des Alpes. En outre, le pays doit gérer une dette publique de 130% du PIB sans aide de sa banque centrale, créant un débat comparable à celui lancé par André-Jacques Holbecq en France puisque depuis 1980, les intérêts payés par l’Etat représentent deux fois le PIB ! Bref, lentement mais sûrement, les fondements de l’adhésion de l’Italie à l’euro sont en train de se défaire. Et si Rome prenait l’initiative du démontage de ce monstre monétaire ?

Quand on prend du recul et que l’on rassemble tous les faits concernant la monnaie unique européenne, il est difficile de ne pas être stupéfait par l’impossibilité de débattre sereinement de la question en France, où tout opposant semble devoir se faire traiter de nationaliste, arriéré ou extrémiste.

18 commentaires:

  1. Je ne comprends pas que sur le problème de l'Euro , vu la gravité des évènements que vous décrivez inlassablement et que je partage , DLR ne se rapproche pas du FN sur ce point. Un programme commun en somme de sauvetage national.Ne pas le faire, décridibilise et DLR et aussi le FN car ce problème passe en quelque sorte au second plan !

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    1. Le FN n'a pas qu'un programme économique... Il a aussi un programme non républicain ultra-conservateur et raciste (préférence nationale, peine de mort, avortement, intégrisme catholique et j'en passe...). C'est cela qui rend tout rapprochement avec DLR ou tout autre parti de rupture républicaine impossible. C'est cela aussi qui fait que le FN n'arrivera jamais au pouvoir. Comment faites vous pour ne pas vous en rendre compte ?

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    2. Vous êtes si sûr que ça que le F.N. n'arrivera jamais au pouvoir ?

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  2. On se demande bien pourquoi le pouvoir en place en Lettonie n’a pas organisé un référendum pour demander au peuple letton s'il souhaitait entrer dans la zone euro. L’organisation d’un tel référendum ne pouvait pas être un facteur de crise, puisqu'il s’agissait là d’un référendum pour entrer dans l’euro, pas pour en sortir. A part la volonté de contourner la volonté populaire on ne voit pas d’autre raison pour laquelle un tel référendum n'a pas été organisé.

    Voir cet article de Charles Sannat intitulé : « La France se retrouvera bientôt dans la même situation que l'Espagne, la Grèce et Chypre » :

    http://www.economiematin.fr/les-experts/item/7855-crise-economique-europe-grece-espagne-chomage

    Dont j’extrais le paragraphe suivant :

    « Le choix pour le reste du monde est en réalité assez simple. Soit vous fermez les frontières en mettant en place de véritables politiques protectionnistes, soit vous retrouvez de la compétitivité en modifiant votre système politico-économique pour le rapprocher du modèle chinois. C’est évidemment la direction que nous avons choisie en Europe et en particulier pour les pays du sud. Cette mise à niveau par le bas ne peut être effectuée qu’au prix d’une période déflationniste terrible puisqu'il faut ni plus ni moins baisser de façon drastique les coûts donc les salaires et les dépenses publiques. Un corollaire évidemment logique est que cette baisse massive des salaires et des droits ne peut que s’accompagner d’une résistance plus ou moins forte des peuples. D’où la nécessité de l’accompagner d’une réduction massive des droits et de la démocratie. Nous sommes donc condamnés à voir la démocratie, telle que nous la connaissions, disparaître. Nous sommes condamnés à voir nos niveaux de vie massacrés. En France, la seule différence par rapport aux autres pays du sud sera la vitesse de délitement plus lente qu’ailleurs. Mais à l’arrivée, nous serons tous Grecs, Espagnols ou Italiens, sans oublier au passage que nous serons également tous Chypriotes, lorsque l’État dans sa grande mansuétude nous laissera l’usage de 80 % de notre épargne, ce qui est une excellente nouvelle (comprendre qu’en réalité l’État vous aura taxé d’office de 10 à 20 % de votre épargne pour éviter la faillite).

    Saul

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  3. À l'heure actuelle il n’y a même pas de débat en France sur la question de l’euro, le pouvoir en place doit surement craindre qu’on arrive à convaincre une majorité d’en sortir.

    Exvil proposait un rapprochement avec le FN sur cette question, moi j’évoquerais plutôt un rapprochement avec le MRC, qui dans sa politique est plus proche de DLR, et serait pour le coup un réel rassemblement des républicains au-delà du clivage gauche/droit.

    Pour lancer concrètement le débat sur la sortie de l’euro, la création par exemple, d’une pétition en ligne sur change.org demandant un référendum sur cette question, ne serait-il pas utile. Ça permettrait d’avoir au moins le mérite de lancer le débat, d’abord sur internet, et en cas de réussite d’obtenir une exposition médiatique nationale (cela a déjà fait ses preuves). Nous avons des arguments, ceux défendant la monnaie unique aucun.

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    1. J'ai trouvé un débat sur l'euro : http://www.bfmtv.com/video/bfmbusiness/decodeurs-leco/zone-soleil-va-t-il-briller-a-nouveau-decodeurs-leco-06-01-5-5-168558/

      Bon c'est sur BFM Business avec uniquement des pro-euro...................

      Et bah certains d'entre eux sont capables de dire que "jamais une union monétaire n'a réussi" mais ils ajoutent "sans budget fédéral".


      En fait, on peut distinguer ceux qui comprennent quelque chose à l'économie : ils jugent que la construction actuelle mène dans le mur.

      Et distinguer encore ceux qui comprennent quelque chose à l'histoire ou plus généralement aux sciences sociales : ils jugent impossible la création d'une fédération en quelques décennies à partir d'Etats qui ont des siècles d'existence.

      Y a aussi ceux qui comprennent mais n'agissent que selon leurs intérêts du moment...

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    2. Le rapprochement DLR/MRC existe, il s'appelle UPR...

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  4. En Lettonie, comme en Italie et partout en Europe les oligarchies politiques, économiques, sociales et médiatiques se moquent de la volonté populaire quant à l'euro. Le débat ne passe guère par des médias et économistes de cour et stipendiés par la système mais pas le net comme lors de la campagne référendaire de 2005. Cependant les idées anti-système progressent quand on constate les termes du débat, de toutes les façons le système eurocratique mourra malgré eux en raison de ses tares congénitales qu'ils n'arrivent pas à corriger. Voir le blog de Jacques Sapir!

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    1. Le texte de Sapir sur la période néolibérale de la Russie est édifiant.
      http://russeurope.hypotheses.org/1873

      Et pendant ce temps les medias traitaient d'Eltsine comme d'un chef d'Etat tout à fait fréquentable et traitent aujourd'hui les oligarques anti-Poutine en heros de la liberté alors qu'ils ont pillé leur pays.


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  5. Lettonie = dumping social (smic a 230 euros) + paradis fiscal
    Combinaison poison !
    La commission Barroso a completement perdu la tete...
    Si on m'avait dit quand, ecolier, j'apprenais "l'europe des 12" que rapidement la France aurait la meme monnaie que la Lettonie !!!
    On nage quand meme dans du grand n'importe quoi.

    Talisker.


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  6. La commission, qui se posait en garant de la démocratie contre Victor Orban en Hongrie, ne semble pas émue par les agissements des politiciens lettons.

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  7. L'UE est anti-démocratique, elle n'a aucune légitimité, c'est acquis, nous sommes d'accord.
    Et si nous voulons mettre par terre cette construction monstrueuse, dévastatrice, nous avons comme moyens à notre disposition la diffusion de nos idées, puis le vote. Au final, la stratégie pour gagner se résume à deux questions essentielles :
    1. que des hommes/femmes charismatiques capables de se faire entendre par les Français entrent en action
    2. qu'un mouvement politique puisse défendre nos convictions sur le terrain électoral
    Il est donc nécessaire pour nous, comme pour nos concitoyens, qu'une offre politique adéquate soit visible et très active, ce qui n'est pas le cas pour le moment.

    Demos

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  8. @ Red2 & Exvil

    Je suis bien d’accord avec Red2. J’ajouterai en plus qu’étant donné que Marine Le Pen est généralement incapable de bien expliquer et défendre sa position

    @ Saul

    Je ne pense pas que la situation actuelle puisse durer très longtemps quand on constate l’état des opinions publiques

    @ Enfant de la patrie

    Bien d’accord. C’est une très bonne idée.

    @ Anonyme

    Bien d’accord.

    @ Talisker

    Très juste

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  9. L'union européenne n'est pas seulement une institution non-démocratique de fait. Elle ne peut continuer à exister et à se développer qu'à la condition même de produire ou d'encourager la production de pratiques, de concepts et de théories juridico-politiques antinomiques avec la démocratie.

    J'en trouve une illustration frappante dans la proposition récente de Hans Gersbach, professeur d'économie à Zurich et conseiller du Ministère fédéral allemand de l'Économie et de la Technologie, de constitutionnaliser la possibilité, pour un gouvernement sortant qui aurait fait la preuve de son sérieux en matière budgétaire, de limiter le montant de la dette publique que ses successeurs seraient en mesure de souscrire, au moins dans la première partie de leur mandat, l'argument étant qu'un gouvernement qui endette le pays engage après tout lui aussi les responsables qui lui succèderont à devoir s'acquitter de cette dette, et que le même principe de continuité doit donc pouvoir s'appliquer aussi en matière de rigueur fiscale…

    « Democratic governments tend to accumulate excessive debt. This column proposes a new rule – the ‘Catenarian Fiscal Discipline’ – which allows a fiscally disciplined incumbent to limit the debt-making of the next officeholder. This way, fiscal discipline today can lead to fiscal discipline in the future. Such a rule would require that we broaden our notion of representative democracy, by recognising the fact that a current government already has various implicit ways of limiting what its elected successors can do. »

    Source : http://www.voxeu.org/article/should-ecb-minutes-be-published

    Le Professeur Gersbach est également co-signataire d'un article d'octobre 2013 (http://www.voxeu.org/article/should-ecb-minutes-be-published) où il se prononçait contre la publication — soutenue pourtant par M. Draghi et plusieurs membres du Directoire — des minutes de la réunion mensuelle du conseil des gouverneurs de la BCE, au prétexte que cette publicité « accroîtrait l'influence des gouvernements nationaux et découragerait les comportements pro-eurozone » (« The publication of attributed voting records and minutes of the ECB council’s meetings would increase the influence of national governments and discourage pro-Eurozone behaviour »).

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    1. Le post ci-dessus relatif aux articles de H. Gersbach était de moi. Je me permets de le compléter par une autre référence, juridique cette fois, trouvée sur le blog de M. Pernin, en date du 25 novembre 2012 (http://contrelacour.over-blog.fr/article-la-neutralisation-de-la-question-de-la-souverainete-par-andras-jakab-112797985.html). Il s'agit d'un résumé de l'article savant du juriste András jakab intitulé « La neutralisation de la question de la souveraineté : stratégies de compromis dans l'argumentation constitutionnelle sur le concept de souveraineté pour l'intégration européenne », dans lequel l'auteur analyse la difficulté pour les juristes d'apprivoiser le concept de souveraineté nationale en vue de le rendre compatible avec le processus d'intégration européenne (la marche vers le fédéralisme). La solution préconisée par le professeur Jakab consiste à « neutraliser » le concept, en lui faisant perdre tout caractère opératoire, faute de pouvoir le faire totalement disparaître du champ de la pensée politique :

      « Alors, comment résoudre juridiquement le conflit entre l’intégration européenne et la souveraineté nationale? Quelle doit être notre réponse à la question concernant la souveraineté dans l'Union Européenne ? Selon moi, le simple fait de devoir répondre à cette question repose sur un malentendu. La tâche réelle des juristes (comme on l’a vu par analogie dans les droits constitutionnels des différents pays) est de neutraliser ces questions. Aux XVIe et XVIIe siècles, les réponses précises à ces questions étaient nécessaires, mais ce n'est plus le cas à l'heure actuelle. Ou bien, dit de manière plus cynique : notre tâche est d'éviter ou de prévenir une telle question, mais si quelqu'un persiste à la poser, alors nous devons lui fournir une « solution » inutilisable en pratique en cas de conflit. » (http://www.juspoliticum.com/IMG/pdf/JP.Jakab25.6.pdf).

      YPB

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  10. " le gouvernement a refusé un référendum à son peuple"

    Un référendum, pour quoi faire ? Rappelez vous du dernier référendum qui nous demandai notre avis...

    Cause toujours....

    D'autre part, les paradis fiscaux se font rare en Europe, l'opacité des banques lettonne est un vrai nouveau souffle pour nos élites

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  11. @ YPB

    Bien d’accord. C’est ce que je crois depuis plus de 20 ans. Merci pour cet exemple glaçant.

    @ Anonyme

    Mon blog n’est pas un panneau publicitaire.

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  12. Les deux premiers "plans d'aide" à la Grèce ont été :

    - un défaut de paiement de la Grèce : 107 milliards d'euros de dette ont été effacés début 2012

    - un prêt de 240 milliards d'euros.

    Résultat : échec total. Aujourd'hui, la Grèce est en faillite. La Grèce a besoin d'un troisième plan d'aide.

    Lisez cet article :

    Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a promis une éventuelle nouvelle aide à la Grèce si celle-ci poursuit les réformes engagées.

    "Si d'ici à la fin 2015, la Grèce a rempli toutes ses obligations et est parvenue à un excédent budgétaire primaire (hors service de la dette) et si un besoin de financement est encore nécessaire, alors nous sommes prêts à faire quelque chose", a déclaré le ministre conservateur dans le quotidien régional Rheinische Post.

    "Nous verrons en milieu d'année" si un troisième plan d'aide à la Grèce, après ceux de 2010 et de 2012, est nécessaire, a-t-il ajouté. Pour le moment, Athènes doit "remplir ses obligations".

    Wolfgang Schäuble, qui avait déjà assuré en décembre que les Européens ne laisseraient pas tomber la Grèce, a souligné que le montant d'une nouvelle aide éventuelle serait "une somme beaucoup plus petite que les aides apportées jusqu'à présent".

    Mais le ministre d'Angela Merkel a loué les efforts consentis par la Grèce pour tenter de sortir du marasme, tout comme l'avait fait jeudi le chef de la diplomatie allemande, Frank-Walter Steinmeier, en visite à Athènes. "Personne ne conteste le fait que la Grèce a fait de nets progrès, plus que l'auraient cru beaucoup de pays", a-t-il ainsi souligné.

    Les créanciers de la Grèce ont injecté environ 240 milliards d'euros grâce à deux programmes de prêts successifs accompagnés d'un programme draconien d'ajustement budgétaire.

    http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2014/01/11/97002-20140111FILWWW00253-une-nouvelle-aide-pour-la-grece.php

    A propos de la Grèce :

    2005 : dette publique de 195,421 milliards d'euros, soit 99,8 % du PIB.
    2006 : dette publique de 224,204 milliards d'euros.
    2007 : dette publique de 239,3 milliards d'euros.
    2008 : dette publique de 263,284 milliards d'euros.
    2009 : dette publique de 299,682 milliards d'euros.
    2010 : dette publique de 329,513 milliards d'euros.
    2011 : dette publique de 355,617 milliards d'euros, soit 165,3 % du PIB.

    En début d'année 2012, la Grèce a fait défaut : 107 milliards d'euros de dettes ont été effacés.

    2012 : dette publique de 303,918 milliards d’euros, soit 156,9 % du PIB.

    Fin juin 2013 : dette publique de 316,969 milliards d’euros, soit 169,1 % du PIB.

    http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/2-23102013-AP/FR/2-23102013-AP-FR.PDF

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