mercredi 7 mai 2014

Hollande 2 ans après : le delorien qui espère un retournement


Hier matin, le président de la République a essayé de frapper les esprits pour fêter les deux ans de sa victoire contre Nicolas Sarkozy en étant invité par Jean-Jacques Bourdin sur RMC. La déception des Français était finalement assez prévisible et tout retournement semble très hypothétique.


Delorien sans surprise

Il y a deux ans et demi, le premier tour des primaires socialistes avaient tranché : le représentant du PS serait un deloro-jospiniste. Dès lors, il n’y avait aucun espoir à avoir, comme l’avait montré le double langage ridicule de l’ennemi de la finance quand il avait été interviewé par le Guardian… Voilà pourquoi j’avais décidé de ne pas choisir entre lui et Nicolas Sarkozy au second tour, malgré une très forte aversion pour le président sortant (qui m’avait poussé à voter contre lui en 2007). Au final, la ligne suivie depuis 2012 s’inscrit dans une continuité sans faille avec l’ancien président de la Commission Européenne, entre politique d’austérité et de l’offre, le tout dans le cadre contraignant de l’UE.

Depuis le début, Hollande poursuit la politique d’austérité engagée par Sarkozy. Mais, logiquement, menée à l’échelle continentale, cela a plongé l’UE dans une seconde récession, remettant à sa place le misérable plan de croissance européen, raillé par Paul Krugman, et négocié pour signer le TSCG Merkozy. Et même si les objectifs de baisse des déficits sont moins déraisonnables, ils restent un mauvais choix quand on voit les conséquences de ces plans ailleurs, comme le note aussi Paul Krugman. Enfin, la baisse du coût du travail, mise en place en trois temps (CICE, annonce de 20 milliards de plus, annonce du pacte de responsabilité) est une priorité ubuesque dans une UE où le coût du travail bulgare ou roumain est prêt de 90% inférieur et où la hausse de l’euro depuis 2 ans annule tout effort en dehors…

Le communiquant en attente d’un vent porteur

Comme une girouette, François Hollande, après avoir gagné l’Elysée sur le rejet de son prédécesseur, espère désormais que la conjoncture se retourne, de manière à regagner les faveurs des français. Le raisonnement n’est pas totalement absurde. En effet, il n’a pas tort sur un point, à savoir que l’activité devrait bien rebondir en 2014 (et probablement 2015), en partie pour des raisons mécaniques, après la nouvelle chute de 2012-2013, comme je l’avais prédit début 2013. Mais, s’il y a reprise, comme on peut l’anticiper depuis le début, ce rebond sera faible (on anticipe 1,5% de croissance en 2015), inégal (aux Etats-Unis, il ne profite qu’à 1% de la population) et temporaire (tous les mécanismes qui mèneront la prochaine crise semblent déjà à l’œuvre aujourd’hui avec le rebond exubérant des marchés).

Malgré tout, il ne faut pas trop sous-estimer l’occupant de l’Elysée, qui l’a beaucoup été dans sa vie, avec l’issue que l’on connaît. Même si sa politique n’est pas la bonne du tout et si sa communication est assez inepte, elle s’améliore, et certains paris politiques peuvent faire du sens si le paysage politique reste focalisé sur trois partis seulement, PS, UMP et FN. En effet, en assumant une politique économique largement recentrée, pour ne pas dire de droite, comme le qualifie Paul Krugman, Hollande occupe le centre du terrain politique, surtout s’il reste opposé à une UMP qui tombe dans un délire ultra-libéralo-austéritaire, comme semble l’indiquer la proposition d’un plan de 130 milliards, rejetée par NKM ou Baroin, et à un FN dont il n’est pas besoin de rappeler ici toutes les limites, plusieurs fois pointées.

Le pari culotté de François Hollande est peut-être d’être réélu faute de mieux en 2017 en repoussant trop à droite une UMP cherchant à se distinguer d’un président sortant embrassant la mondialisation et la course à la compétitivité. Pas si fou pour lui en cas de hoquet de notre histoire politique, mais désastreux pour une France qui persisterait alors dans l’erreur en l’absence d’alternative crédible.

9 commentaires:

  1. Peu probable qu'on fasse 1.5 % en 2015. Selon Natixis, on devrait faire 0.7% en 2014 et au mieux 1.2% les années suivantes, la croissance potentielle de la France étant de 0.8%, et encore à condition qu'une nouvelle crise ne nous fasse pas replonger dans la récession.
    http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=76643
    http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=76596

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  2. @Laurent Pinsolle,
    il ne faut pas oublier que le seul fait d'arme politique de Hollande, avant d'être président, a été sa survie à la tête du PS pendant plus de dix ans, entre 1997 et 2008. Durant cette période, l'exception des régionales de 2004, ce fut une litanie d'échecs retentissants, dont une cuisante défaite le 21 avril 2002, un échec au référendum de 2005 et un nouveau revers au présidentielles de 2007. Et pourtant, Hollande a survécu...
    Effectivement, la tactique de Pépère est bien connue: vaincre par l'ennui et par défaut. D'un point de vue tactique, Hollande s'y connaît, mais quid de l'intérêt du pays? Je ne croyais pas ça possible, mais même Sarkozy était plus altruiste et moins égocentrique que lui: de ma vie, je n'ai jamais vu un chef d'état français aussi peu soucieux de ses concitoyens, seul sa petite personne le préoccupe.
    Hollande, ce n'est pas Louis XVI, c'est plutôt Louis XV (et sa Pompadour Trierwiller), qui disait "après moi, le déluge..."

    CVT

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  3. Qu'est-ce que c'est que ces histoires...?

    http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2014/05/06/97001-20140506FILWWW00296-france-des-patrouilleurs-chinois-pour-les-touristes.php

    http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2014/05/06/des-policiers-chinois-deployes-en-france-cet-ete-pour-proteg-11718.html

    "Un vaste plan pour la sécurité des touristes, qui sera lancé comme tous les ans au début de l'été, selon cette source de Beauvau, "prévoit que des patrouilleurs chinois effectueront des rondes sur les sites touristiques" fréquentés par leurs compatriotes en France."

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  4. Quelques uns vont acheter des voitures ou des machines au bout du rouleau, juste des achats de remplacement, certainement pas de quoi créer un croissance suffisante.

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  5. Complètement d'accord sur l'analyse du comportement d'Hollozy, qui attend une risée pour gonfler ses voiles et qui surjouera en qualifiant le moindre souffle d'air de vent puissant. Il n'en demeure pas moins qu'il lui faudra beaucoup du talent, dont il n'est pas pourvu, pour nous convaincre. Décider autoritairement de la politique du pays est une chose, convaincre les Français qu'il est à la hauteur des défis en est une autre.

    Pour ce qui concerne "le pari pas si fou, mais désastreux", nous allons payer cher - à l'exception des riches et des transnationales - son incompétence, sa duplicité, son caractère velléitaire et son coming out libéral-libertaire.

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  6. Il faut s’appuyer sur le fait que la stratégie du retournement ne peut fonctionner en termes électoraux que si les citoyens ne comprennent pas qu’on essaye de les manipuler. Dévoiler la manipulation est alors plus efficace que la mise en place de règles. Dont acte.

    http://www.ofce.sciences-po.fr/blog/election-et-derivee-du-chomage-la-strategie-du-retournement/

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  7. @ Moi

    On verra. Entre 1,2 et 1,5%, la différence est ténue de toutes les façons. Je suis d’accord pour dire que le potentiel de croissance dans le contexte actuel est faible. Mais il peut toujours y avoir un emballement des marchés…

    @ CVT

    Bien d’accord sur l’intérêt du pays. Mais je crois qu’on sous-estime son sens tactique (il a été un élève de Mitterrand). Sarkozy plus altruiste et moins égocentrique : il ne faut pas pousser quand même…

    @ Anonyme

    Les marchés sont exubérants et irrationnels…

    @ Démos

    Après, s’il a Le Pen et Sarkozy en face, bien malin qui peut exclure qu’il gagne à nouveau…. Mais ce serait désastreux pour la France

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    1. Et vous en seriez responsables. Il y arrivera s'il fait baisser le chômage dans le cas contraire ça sera sarko.

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