vendredi 18 mars 2016

Désertion fiscale, profits, fiscalité, droit du travail : le hold-up des actionnaires

Quelle drôle d’époque ! Alors que le niveau de profits des entreprises par rapport au PIB bat des records, l’agenda des multinationales continue à avancer. Elles veulent contester les choix des Etats ? Les tribunaux d’arbitrage (défendus par le TAFTA), le leur permettent. Elles veulent un contrat de travail plus souple ? Les pays européens s’exécutent. Elles veulent moins d’impôts ? Elles peuvent fuir le fisc, tout en comptant sur des baisses. Les marchés toussotent ? Les banques centrales se pressent à leur secours. En somme, des manifestations de la prise de pouvoir des actionnaires.



Quand l’agenda du Medef s’impose

Avec un peu de recul, difficile de ne pas voir à quel point l’agenda des grandes multinationales s’est imposé en quelques années, une drôle d’issue à la crise de l’ultralibéralisme en 2008, comme si nous accentuions tout ce qui nous avait mené au bord du gouffre, ainsi que je l’avais anticipé début 2009. Partout, le recul de l’Etat Providence s’accélère, au point que de nouveaux aéroports sont en vente, après celui de Toulouse… Le plus effarant est que la « gauche » au pouvoir ne va pas moins loin que la droite puisque le P’S’ trouve le moyen de baisser les cotisations sociales patronales de 50 milliards et de fortement libéraliser le code du travail, en deux temps, avec les lois Macron et El Khomri, dépassant les dits Républicains par la droite sur les questions économiques, poussant ces derniers plus à droite encore.

Car dans cette loi de la jungle économique, les nouveaux seigneurs sont bien les multinationales et non  ces pauvres Etats en recherche de ressources fiscales, cherchent à les attirer par tous les moyens, quitte à baisser toujours davantage leurs impôts, comme on vient de le voir avec l’annonce, par la Grande-Bretagne, d’une baisse de son impôt sur les sociétés à 17%, alors même que les dépenses d’investissements ont été sacrifiées et divisées par deux en une décennie ! Cela est d’autant plus effarant que bien des multinationales continuent sans vergogne à localiser, artificiellement, mais légalement, les profits dans des parasites fiscaux pour échapper à leur contribution à la collectivité : le Luxembourg héberge 11% des profits des banques de l’hexagone, leur activité y étant beaucoup plus profitable

Ce que cela révèle, avec l’explosion des inégalités, c’est que les actionnaires sont aujourd’hui les maîtres de ce monde du laisser-faire et du laisser-passer, où l’argent sert de boussole. Nous vivons dans une sorte de jungle économique où les prédateurs ultimes sont ces actionnaires qui extraient toujours plus d’argent des entreprises qu’ils possèdent, sous la forme de profits (à des niveaux records), de dividendes ou de rachats d’action. Tels des Attila des temps modernes, la protection sociale, les emplois et les implantations du passé ne repoussent pas sous leur passage puisqu’ils organisent sans cesse une compétition violente et destructrice pour investir  temporairement leurs fonds. Tout discours sur la compétitivité camoufle l’agenda brutal, égoïste et déséquilibré des actionnaires.


Tout le problème est que cet ordre produit une course au moins-disant social, salarial, environnemental et normatif, qui ne profite qu’à une toute petite élite, inconsciemment achetée pour servir ses actionnaires cupides et destructeurs. Toute la question est de savoir comment leur règne prendra fin. Le succès de Bernie Sanders ouvre la voie à une issue démocratique, comme dans d’autres pays européens.

6 commentaires:

  1. Le succès de Bernie Sanders est une chose très relative, un soufflet qui va retomber.Il n'empêche que sa percée est significative d'une direction souhaitable.
    En France nous sommes toujours dans une ère commencée en 1992 avec le Traité de Maastricht où toute la classe politique s'est mise d'accord pour faire l'Europe à tout prix. Dans cette optique le parti socialiste a entériné le caractère libéral-droitier de cet objectif. La présidence Hollande avec Valls et Macron n'est qu'une étape supplémentaire de la libérale-droitisation entamée en mars 1983. La gauche dite radicale n'ose pas rimpre avec l'Europe, cette Europe-là par peur de se retrouver "toute nue" sur des positions dites selon elle de droite à savoir pour la souveraineté nationale. A cet effet Frédéric Lordon s'essaie à faire comprendre à ses amis qu'il y a une sortie de gauche à cette Europe-là par la souveraineté populaire alors que si la souveraineté est nationale seule le peuple en est le dépositaire et son expression. Cependant il n'est pas entendu parce que celui qui pourrait porter cette orientation politique, Jean Luc Mélenchon, n'ose pas cette rupture est prisonnier de son vieux schéma de pensée selon lequel l'UE serait forcément une avancée, un progrès. Cette gauche dite radicale ne veut voire ne peut tirer les conséquences de l'échec de Tsipras et Syriza en Grèce l'an dernier.
    La droite parlementaire n'envisage pas non plus d'évoluer tant ses dirigeants sont, eux aussi prisonnier du dogme quasi religieux de l'Europe à tout prix. En conséquence seul reste le "diable" le Front national de Marine Le Pen et Florian Philippot mais personne, vous non plus, ne veut à tout prix envisager de diner avec ce diable. Résultat l'impasse politique est complète. Contrairement à ce que vous ne voulez pas voir le FN est en train d'évoluer plus qu'on ne veut le voir par paresse et conformisme comme la presse nous en tend un miroir confortable. Jacques Sapir a bien raison, est plus lucide que bien d'autres, lui qui se revendique d'être un homme de gauche, a déclaré que l'on ne pourra pas faire l'impasse sur un FN profondément rénové. Le problème est l'appréciation sur ce changement et sa crédibilité. Ce qui est sûr c'est que le FN a encore fort à faire pour avoir la crédibilité nécessaire pour faire partie d'une alternance politique, une vraie.
    Vous, LH, faites partie de ces gens qui préféreront voter pour un oligarque malfaisant comme Juppé plutôt que le diable FN.

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  2. Après , le souci avec philipot , c'est marion maréchal le pen et compagnie. Ellen ne croit pas à la sortie de l'euro

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  3. Voilà.

    Autre demande des multinationales :

    http://www.atlantico.fr/decryptage/crise-migrants-et-declin-demographique-double-defi-vis-vis-duquel-rien-ne-se-passe-comme-prevu-pour-europe-michele-tribalat-2628144.html

    à la fois pour des raisons de coûts salariaux et pour une raison stratégique plus profonde : faire définitivement disparaître l'Etat-nation, c'est à dire la seule entité capable de s'opposer à ces évolutions.

    Mais ne comptez pas sur le "gaulliste" Herblay pour vous en parler, la seule pensée d'être ponctuellement d'accord avec Zemmour faisant horreur à cet accro au politiquement correct (qui s'ignore).

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  4. @ Anonyme

    Je ne crois pas vraiment aux conversions du FN sur ces questions. Ils tenaient encore un discours ultra-libéral il y a quelques années, alors si c’est pour avoir les mêmes en pire… En outre, je pense qu’ils bloquent le système.

    @ Anonyme 12h54

    Sur les migrants, en quoi suis-je politiquement correct ? Sur France 24, plusieurs fois, j’ai été invité comme opposant à la pensée dominante des médias. Si j’ai critiqué Zemmour, c’est pour ses arrangements avec la vérité et sa vision des femmes

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