samedi 30 juin 2012

Les illusions du énième plan européen


Des dirigeants européens qui se réunissent jusque tard dans la nuit. Un plan pour combattre la crise économique et financière. Des marchés qui applaudissent. Ce scénario donne une impression de déjà vu. Ce énième sommet et ce énième plan sont-ils différents des précédents ?

Scénario différent pour résultat équivalent ?

Difficile d’y voir clair dans le brouillard des déclarations du lendemain du sommet européen. D’un côté, Angela Merkel vient d’envoyer au cimetierre les euros obligations en disant qu’il n’y aurait pas de mutualisation des dettes de son vivant, utilisant un langage d’une radicalité peu commune dans la bouche de la chancelière allemande. Mais de l’autre côté, le résultat du sommet de jeudi est souvent présenté comme une victoire de l’Italie et de l’Espagne.

Cependant, en creusant les articles de presse, on constate des divergences. Quand Le Monde affirme que « Madrid et Rome forcent la main à Berlin », Le Figaro soutient que « Angela Merkel cède pour sauver l’essentiel ». L’un affirme que l’Allemagne a cédé sur les questions capitales de l’aide directe des banques par le fonds européen et sur l’aide aux pays en difficulté. L’autre tient un discours assez différent, modérant la portée des mesures, qui seraient toujours conditionnelles.

Difficile d’y voir clair dans les déclarations de ce lendemain de sommet. En outre, une déclaration n’est pas un traité. Seuls les traités déterminent la conduite des politiques européennes et pas des déclarations d’intention de fins de sommet. Et il est difficile de savoir si cet accord un peu nébuleux va vraiment changer les choses. Certes, les marchés ont fortement rebondi, mais ils avaient rebondi dans le passé et n’avaient pas montré une grande pertinence dans leur jugement.

Quatre questions techniques / Union bancaire

vendredi 29 juin 2012

Vers un nouveau plan européen pour Athènes ?


Quel grand écart ! Alors qu’Angela Merkel vient d’affirmer qu’elle refusera la mutualisation des dettes « aussi longtemps qu’elle vivra », le nouveau gouvernement grec demande un relâchement des conditions des plans précédents. Bref, le maintien dans l’euro demande un nouveau plan !

Un maintien qui ne sera pas gratuit

Certes, les demandes de Samaras ne sont pas celles de Tsipras, mais le nouveau Premier Ministre a tout de même demandé aux autorités européennes un délai de deux ans pour atteindre les objectifs qui avaient été fixés en début d’année (soit il y a quelques mois à peine), avec pourtant les mêmes personnes des deux côtés de la table, signe que le plan de février était totalement irréaliste, comme beaucoup l’avaient noté, ainsi que votre serviteur sur ce blog à l’époque.

Même si Nouvelle Démocratie souhaite rester dans le cadre des plans européens, la nouvelle majorité demande un relâchement des contraintes et de réduire le déficit « sans ajouter de nouvelles coupes de salaires, de pensions et d’investissements publics ». Le vent du boulet de la défaite électorale n’est pas passé loin et les nouveaux dirigeants de la Grèce ont enfin décidé de prendre un minimum la défense de leurs compatriotes et cesser de tout accepter.

Résultat, la Grèce aurait besoin de 20 milliards de plus et de deux années supplémentaires pour atteindre les objectifs de la troïka. Bref, après le 1er plan du printemps 2010, celui de l’été 2011 et celui de ce début d’année, les dirigeants européens devraient concevoir un 4ème plan, potentiellement lors du sommet qui commence aujourd’hui. Et encore, on ne compte pas les différentes aides apportées par la BCE, qui a acheté de la dette grecque et finance les banques…

Le signe d’une impasse

jeudi 28 juin 2012

Merkel : « pas d’euros obligations tant que je vivrai » !


La chancelière allemande ne pouvait pas mieux clarifier la situation avant le sommet européen qui commence aujourd’hui. Jamais l’Allemagne n’acceptera la collectivisation des dettes, une idée sortie du cerveau malade des eurocrates depuis deux ans.

Pourquoi l’Allemagne a raison

Les unes du Bild, le jugement de la cour de Karlsruhe ou encore un récent sondage indiquant que 79% des Allemands sont opposés aux euros obligations (et seulement 14% favorables) auraient du mettre un point final à cet incroyable débat. Mais non, la France ou The Economist font une campagne ouverte en faveur des euros obligations. C’est sans doute pour cela qu’Angela Merkel a mis ses pieds dans le plat en affirmant qu’il n’y aura pas de mutualisation des dettes de son vivant.

Et il faut dire que cela est totalement compréhensible du point de vue de l’Allemagne. Bien sûr, le pays risque de hâter la fin de l’euro de la sorte, provoquant alors une cascade de dévalutions compétitives des autres monnaies européennes face au deutsche mark. Mais Berlin en a déjà vu d’autres, comme en 1993, et cela n’avait pas mis l’économie du pays à terre. En effet beaucoup d’exportations allemandes n’ont pas de substitut et peuvent supporter une hausse des prix.

Mieux, une réévaluation a aussi des avantages, comme un gain de pouvoir d’achat sur les produits importés, et la possibilité de voyager à moindre coût à l’étranger. Bref, ce ne serait pas la catastrophe que certains annoncent. A mettre en parallèle avec les 4000 milliards d’euros de caution solidaire que demandait le mécanisme imaginé par l’institut Bruegel. Patrick Artus avait réalisé un calcul tendant à démontrer que le maintien de l’euro était préférable, mais cela était douteux.

Une idée totalement aberrante


mercredi 27 juin 2012

Hausse du SMIC de 2% : le prix de la mondialisation


2% au lieu de 1,4% ! Les Echos avaient donc raison. Le gouvernement a donc choisi de donner un coup de pouce symbolique pour ne pas dire dérisoire au SMIC (trois fois moins que ce que Jacques Chirac avait accordé en 1995). Une nouvelle illustration des ravages de la mondialisation.

Des sociaux-libéraux plus libéraux que sociaux

Il faut relire le papier de Frédéric Lordon qui théorisait il y a quelques semaines les futurs remaniements de François Hollande, faisant un parallèle avec tous les reniements de Lionel Jospin de 1997 à 2002, sur l’équilibre (déjà) entre la croissance et la rigueur, l’Europe, les privatisations (France Telecom…). Bien sûr, la présence de quelques nonistes au gouvernement pouvait donner l’illusion d’une ouverture aux idées alternatives, mais le choix d’hier montre que cela est illusoire.

Il est tout de même stupéfiant qu’une équipe socialiste arrivant au pouvoir après dix ans d’opposition commence son mandat par accorder royalement 0,6% de coup de pouce au SMIC après des années sans le moindre coup de pouce (signifiant que les smicards ne touchaient pas un centime des gains de productivité qu’ils faisaient). J’imaginais il y a quelques jours que François Hollande avait laissé fuité ce chiffre pour au final donner un peu plus et apparaître généreux.

Mais non, toute la rigueur et le renoncement économique du deloro-jospinisme se retouvent synthétisés dans cette décision qui montre que ces socialistes n’ont même pas l’intention de changer la vie. Ils vont gérer prudemment le pays, comme des radicaux de la 4ème République, un profil qui convient tellement bien à François Hollande. Soit dit en passant, les classes populaires savent bien qu’elles n’auront pas grand chose à attendre d’une équipe qui capitule si tôt devant la mondialisation.

La mondialisation en procès


mardi 26 juin 2012

Cette gauche avocate du néolibéralisme


C’est un des paradoxes de notre vie politique que de voir une partie importante de la gauche défendre mordicus le néolibéralisme le plus antisocial. Entre un PS qui veut augmenter le SMIC de 2% et Le Monde qui annonce qu’augmenter le SMIC détruit des emplois, cette « gauche » surprend.

La mondialisation invente la gauche antisociale

Il y a quelques semaines, dans un papier sur « les trois gauches », j’avais parlé de cette « gauche social-libérale », qui n’a plus de sociale que le nom, parfaitement représentée par cette fondation Terra Nova qui a théorisé l’abandon du peuple par le Parti Socialiste. C’est ainsi que dimanche, en écoutant France Info, je suis tombé sur une chronique économique qui dénonçait le conservatisme d’Air France, qui ne se serait pas suffisamment adaptée à la concurrence.

Pour un peu, le journaliste aurait dénoncé l’attachement conservateur aux acquis sociaux des syndicats ! Pas un mot sur la concurrence déloyale d’un certain nombre de compagnies, qu’elles soient issues de pays produisant du pétrole et qui ont fait des compagnies aériennes un axe de leur développement économique ou de toutes les compagnies qui profitent des salaires beaucoup plus bas des pays en voie de développement pour tailler des croupières à la compagnie…

De même, Le Monde a publié une interview sidérante pour un journal qui se dit de gauche, dénonçant toute augmentation du SMIC au-dela de l’inflation, affirmant que nous avions trop augmenté les salaires dans les dernières années, que cette augmentation détruit des emplois, du fait de la mondialisation. Bref, le Medef peut être content, le quotidien de référence de la gauche reprend un à un ses arguments. Dans un monde mondialisé, il n’est pas possible de monter les salaires en France.

Les bisounours de l’économie


lundi 25 juin 2012

Quel avenir pour Debout la République ?


Samedi, Debout la République réunit son Conseil National pour faire le point sur cette séquence électorale de 2012. Devant la montée légitime des débats sur Internet entre nos militants, je tiens à exprimer ici mon opinion, à titre purement personnel.

Une année chargée

La séquence électorale de cette année est un mélange doux-amer. Doux car Nicolas Dupont-Aignan a été candidat à l’élection présidentielle, contrairement à 2007, qu’il a fait un score honorable, dépassant deux partis installés depuis longtemps (Lutte Ouvrière et le NPA), à quelques dixième de pourcentage de la candidate des écologistes. Doux car il a été réélu brillamment député, malgré la présence d’un candidat UMP et que notre parti accède au financement public.

Mais un peu amer également car beaucoup d’entre nous espérions un score plus important aux élections présidentielles, sous-estimant peut-être la difficultés d’émerger pour un primo candidat. Un peu amer car beaucoup de nos vaillants candidats aux élections législatives n’ont pas dépassé 1%. Enfin, un peu amer car, malgré le travail formidable abattu par les militants sur le terrain et au centre national, notre mode de fonctionnement comporte encore des dysfonctionnements.

Un contexte différent

L’élection de François Hollande et le retour au pouvoir des socialistes changent profondément le contexte politique. Pendant les cinq années du mandat de Nicolas Sarkozy, notre position politique était très originale, peut-être pas toujours très lisible d’ailleurs. Venu de la droite, nous exprimions une critique très dure de Nicolas Sarkozy, tout en tenant un discours très progressiste sur les questions économiques, volontiers à gauche du PS sur la critique de la mondialisation néolibérale.

Du coup, la perception du mouvement n’était pas toujours très claire. Si les médias nous classent volontiers entre l’UMP et le Front National, dans le réduit villiériste, la perception des militants et des sympathisants est souvent différente, avec une forte population issue de la gauche dans nos rangs, pour qui les notions de gauche et de droite ont fini par être dépassées, et qui rejoint le raisonnement d’une grande partie de ceux qui viennent du gaullisme, notamment les anciens séguinistes.

Faut-il pencher à droite ?

dimanche 24 juin 2012

Europe : une béquille pour la croissance


On comprend un peu mieux pourquoi la France a cédé sur les euros obligations (et la réforme de la BCE, et le juste échange). Angela Merkel a donné son accord pour un plan de croissance qui permet à François Hollande d’avoir une victoire diplomatique, illusoire dans les détails.

Un plan principalement cosmétique

En affichant ce plan à 120-130 milliards d’euros, les dirigeants européens donnent le change, à condition de ne pas trop regarder dans les détails. François Hollande peut fanfaronner : « qui aurait pu dire, il y a encore quelques semaines, qu’elle aurait été à ce point à l’ordre du jour du conseil européen ? », mais le nouveau président de la République n’a pas tellement infléchi l’agenda européen. Il a aussi cédé sur les euros obligations, le statut de la BCE ou le juste échange…

En outre, ce plan semble bien léger par rapport aux plans de soutien aux banques ou aux créanciers des pays en difficulé. Il a déjà fallu deux plans d’une taille équivalente pour sauver les créditeurs de la Grèce : il sera difficile de faire croire qu’un tel montant permettra de relancer l’économie de l’Union Européenne toute entière. 1% du PIB européen, ce sera léger pour relancer des économies tombées dans la récession, surtout si cette somme n’est pas dépensée sur une année.

En outre, la description du plan donne l’impression qu’il est un assemblage de brics et de brocs. Il mêle des fonds européens non dépensés (55 Mds), une augmentation des moyens de la Banque Européenne d’Investissement (ce qui permet d’utiliser l’effet de levier, un euro de capital permettant d’en emprunter dix fois plus… sic) et des « projects bonds » communs pour financer des infrastructures… ce qui signifie que les dépenses s’étaleront sur une assez longue période.

Chauds-froids allemands

samedi 23 juin 2012

SMIC : le coup de pouce, c’est du flan


2% au lieu de 1.4% ! Il faut espérer pour le gouvernement qu’il laisse filtrer une fausse information et qu’il décidera d’une hausse plus importante au final. Car si on en restait à un tel chiffre, la différence entre Hollande et Sarkozy serait ténue pour les bas revenus…

Chirac, trois fois plus social que Hollande

« Je n’aime pas les socialistes parce qu’ils ne sont pas socialistes » : comment ne pas penser à cette phrase attribuée au Général... Le candidat avait promis un « coup de pouce » pendant la campagne, prenant garde, néanmoins, de ne s’engager sur aucun chiffre. Après un suspense insoutenable, si le gouvernement ose ne proposer qu’une augmentation de 2%, le masque social du quinquennat risque bien de tomber quelques semaines à peine après l’arrivée au pouvoir.

0.6% de plus que prévu, c’est une misère après cinq années d’augmentation a minima. Autant dire que les smicards ne touchent absolument rien des gains de productivité. Il faut dire que la pression mise par l’introduction de la zone euro n’est guère favorable à la hausse des salaires, surtout dans un pays comme le nôtre, qui a un des salaires minimums les plus élevés d’Europe. La monnaie unique, c’est aussi cela, une pression à la baisse des bas salaires, comme on le voit ailleurs.

Pire, il faut rappeler ici que le président Jacques Chirac avait été beaucoup plus généreux pour le SMIC. Si les effets des 35 heures ont joué de 2002 à 2007, on peut se souvenir qu’en 1995, c’est une hausse de 4% que le président de la fracture sociale avait décrétée, deux fois plus que l’inflation, soit un gain de pouvoir d’achat trois fois plus important que notre président socialiste. Jacques Chirac trois fois plus social que François Hollande, voici un cruel constat pour le PS.

Un problème systémique

vendredi 22 juin 2012

Hollande chahuté en Europe


La victoire de Nouvelle Démocratie en Grèce réduirait-elle le besoin d’unité des dirigeants européens ? Les échanges d’amabilité entre dirigeants européens deviennent de plus en plus courants. François Hollande n’est pas le dernier à en souffrir.

Hollande vs Cameron

Tout d’abord, la perfide Albion, par la voix du premier ministre David Cameron, a fait savoir que les riches contribuables qui souhaiteraient éviter la fture tranche marginale d’impôt sur le revenu à 75% (pour les revenus supérieurs à un million d’euros) étaient les bienvenues en Grande-Bretagne. Il faut dire que parallèlement, le gouvernement britannique a décidé dans le sens inverse en baissant son taux marginal de 50 à 45% (et potentiellement 40% à terme).

Par-delà l’aspect cosmétique de la mesure (même si elle est juste), il faut noter qu’en absence de contrôle sur les mouvements de capitaux et de personnes, elle peut être très contre-productive. Les socialistes ont oublié que la libéralisation rend beaucoup plus difficile des mesures nationales qui vont à rebours de ce que les autres pays font. Dans un cadre aussi mondialisé, cette mesure va malheureusement sans doute coûter plus cher en recettes perdues qu’en nouvelles recettes.

Hollande vs Merkel

Les débuts du nouveau duo franco-allemand sont difficiles. Après quelques critiques par presse interposée, Angela Merkel a d’ores et déjà gagné une première manche puisque Paris a renoncé à la mise en place rapide d’euro obligations, qui faisaient pourtant partie du programme du candidat. Il faut dire qu’une telle idée, déjà abandonnée en son temps par Nicolas Sarkozy est totalement ubuesque outre-Rhin, soutenue par 14% de la population seulement et opposée par 79%.

Résultat, François Hollande a déjà cédé sur ce sujet. Si l’opposition de l’Allemagne aux euros obligations est parfaitement compréhensible (cela revient à donner une caution solidaire gigantesque aux autres pays européens), comment ne pas s’étonner que la France ne semble pas avoir obtenu grand chose en contre-partie de ce premier renoncement. Cela rappelle ce qu’écrivait Frédéric Lordon il y a quelques semaines, et qui pronostiquait déjà les renoncements de la nouvelle équipe.

Une Europe ingérable

jeudi 21 juin 2012

L’euro est responsable de la crise de la zone euro


C’est un des combats sémantiques des deux dernières années. Les néolibéraux européistes avaient réussi brièvement à faire parler d’une crise des dettes souveraines avant que la réalité ne finisse à nouveau par s’imposer à tous : il s’agit d’une crise de la zone euro et donc de l’euro.

Une mystification qui tombe

En 2010, quand les premières crises ont commencé, on parlait bien d’une crise de la zone euro puisque seuls les pays de l’Union Economique et Monétaire étaient concernés. Les énormes déséquilibres (déficits commerciaux du fait de la divergence des coûts de production) accumulés depuis des années et camouflés par des taux d’intérêt similaires avaient fini par apparaître avec la grande crise financière déclenchée en 2008, qui a provoqué la divergence des taux d’intérêt.

Le fait que la crise débute en Grèce a donné quelques arguments aux néolibéraux qui voulaient profiter de la crise pour avancer leur agenda en parlant de « crise des dettes souveraines » au lieu de crise de la zone euro. Mais rapidement, la situation est devenue plus complexe car l’Espagne et l’Irlande étaient les pays les moins endettés de la zone euro en 2007, avec seulement 40% du PIB de dette. Du coup, il devenait impropre de parler de crise des dettes souveraines.

Mais cela n’a pas empêché certains commentateurs de mélanger les excès du secteur immobilier (privé) avec certains excès de dépenses publiques bien que cela n’ait rien eu à voir. Pire, au contraire, la crise qui touche l’Espagne démontre justement toutes les carences de la monnaie unique car on peut très largement attribuer la bulle immobilière ibérique au passage à l’euro, qui a imposé un argent trop bon marché, sans possibilité pour le gouvernement de faire grand chose.

Comment l’euro provoque la crise


mercredi 20 juin 2012

La Grèce offre un répit à l’euro


La victoire de Nouvelle Démocratie en Grèce dimanche permet d’éviter le conflit majeur qu’aurait provoqué l’arrivée au pouvoir de SYRIZA, qui refusait les plans d’austérité. Si l’euro gagne quelques semaines de calme à court terme, pas sûr que cela change quoique ce soit au final.

Un gain à court terme

Depuis plus de deux ans, l’Europe cherche à gagner du temps. Dans le cas où Tsipiras aurait gagné les élections, alors, ils se seraient rapidement trouvés dans une situation où il aurait fallu trancher : soit laisser la Grèce ne peut plus appliquer les plans de la troïka, soit la pousser en dehors de la zone euro en suspendant l’aide internationale. Le second choix semblait déjà acté tant des officiels avaient indiqué que finalement, ce n’était pas un drame que la Grèce quitte la monnaie unique.

Mais là, tout est plus simple. Nouvelle Démocratie a fait acte d’allégeance aux plans qu’elle a mis en place en Grèce depuis la constitution d’un gouvernement d’union nationale, avec le Pasok. Même si une renégociation des conditions devrait logiquement avoir lieu (les hypothèses du plan du début d’année étant hautement fantaisistes), globalement, nous allons pouvoir continuer dans la même direction, à savoir toujours plus d’austérité, de récession et de chômage.

Le principal foyer de l’incendie économique qui touche l’Europe est circonscrit, pour un moment. Le sort de la Grèce était important car une sortie de la Grèce de la zone euro pouvait provoquer un effet domino qui aurait pu abattre l’ensemble de ce château de carte monétaire qu’est l’union monétaire européenne. Si les marchés auraient pu considérer que l’euro était plus fort après une sortie de la Grèce, ils auraient également pu cibler la prochaine victime et provoquer la fin de la partie.

Une perte à moyen terme

mardi 19 juin 2012

Grèce : l’incroyable victoire de l’austérité


Il y a trois semaines, je parlais d’une possible victoire de la gauche radicale. Finalement, c’est le parti de droite Nouvelle Démocratie qui vient de remporter de peu les élections législatives en Grèce. Les Grecs ont préféré la clarté vis-à-vis de l’euro plutôt qu’une remise en question des plans européens.

Le supplice de l’euro va durer

Si trois quarts des Grecs ne supportent plus les plans d’austérité européens, le même pourcentage souhaite conserver la monnaie unique et c’est sur ce dilemme que c’est fondé le résultat des élections législatives de dimanche. La population grecque a sans doute préféré voter pour un parti qui acceptait les plans européens (tout en promettant une renégociation), ce qui garantit le maintien dans l’euro. En faisant le grand écart entre le refus des plans et le soutien à l’euro, Syriza a perdu.

Nouvelle Démocratie a très bien su jouer des ambiguités de la gauche radicale en parlant « d’un choix entre la monnaie unique et le cauchemar d’un retour à la drachme ». Cet article du Monde montre bien que les soutiens de Samaras ont préféré la clarté du discours de Nouvelle Démocratie et avaient peur de la possible sortie de l’euro qu’impliquait le refus des plans européens proposé par Tsiripas. On peut se demander si Syriza n’aurait pas du défendre le retour à la drachme.

Comme on pouvait le craindre dès le début 2010, les Grecs ne semblent pas encore prêts à couper le lien avec cette Europe qui, pourtant, les torture depuis deux ans. La peur d’être seul, la volonté de ne pas mordre la main qui les a aidé pendant des décennies fait sans doute que la population hésite encore à rejeter ces plans, aussi durs soient-ils. Du coup, la monnaie unique gagne un peu de temps, où vont être à nouveau démontrées toutes ses carences

Une sortie de l’euro repoussée

lundi 18 juin 2012

Le Parti Socialiste gagne la majorité



Hier, nous clôturions le cycle électoral de l’année 2012 avec le second tour des élections législatives. Un vote qui n’a pas suscité un grand enthousiasme des Français avec une abstention record. Logiquement, le Parti Socialiste l’emporte et parvient à obtenir la majorité absolue seul.

Les législatives confirment les présidentielles

De manière curieuse, à chaque élection législative qui suit une élection présidentielle, certains se demandent si les Français ne vont pas voter différemment pour l’Assemblée Nationale. C’était le grand fantasme de 1981, également évoqué en 1988 et en 2002. Comme toujours, les Français ont choisi de confirmer leur vote précédent en donnant une majorité nette au Parti Socialiste. Mieux, les 25 ministres engagés dans le combat électoral l’ont emporté.

Du coup, nous n’aurons pas de démission du gouvernement pour suivre la curieuse règle que Jean-Marc Ayrault a adoptée à la suite de 2007. En effet, il est tout de même surprenant de confier le sort d’un ministre à peine nommé (et qui n’a pas pu vraiment  agir) aux électeurs d’une seule circonscription. Ségolène Royal a été largement battue à La Rochelle  et elle a ajouté à la défaite l’inélégance en intervenant avant 20H et le ridicule d’un tri entre voix de gauche et de droite.

Cette clarté est finalement logique et souhaitable. Le PS a donc les pleins pouvoirs pour cinq ans, l’Assemblée Nationale, le Sénat, les collectivités locales. Il sera donc comptable de son résultat dans cinq ans. Même s’il est probable que la nouvelle majorité évoque le mauvais héritage de l’équipe précédente avec le rapport à venir de la Cour des Comptes ou la crise européenne, François Hollande a maintenant cinq ans pour démontrer qu’il a des solutions pour notre pays.

Le cimetierre des éléphants

dimanche 17 juin 2012

La zone euro au bord de l’implosion


Il y a quelques jours, Thierry Fressoz parlait naïvement du « retour inattendu de l’idée européenne ». Mais, depuis, les dirigeants européens se critiquent sévèrement par média interposés, ce qui pourrait hâter la fin de cette construction monétaire qui se révèle ingérable.

Querelle sur l’euro

La querelle actuelle sur l’avenir de la zone euro est d’autant plus grave qu’elle a lieu alors que les taux sur la dette espagnole n’ont jamais été aussi hauts. Et ses désaccords étalés en public accentuent la tension sur les marchés, précipitant le besoin d’un énième plan, sur lequel il semble bien évident que les dirigeants européens sont incapables de s’entendre. Bref, à la veille d’un vote crucial en Grèce, l’avenir de la monnaie unique ne semble plus tenir qu’à un fil.

Le sujet de la querelle est simple. François Hollande a publié un plan pour sortir de la crise de la zone euro qui représente une simple fuite en avant qui consiste à mettre en commun une partie de la dette des Etats européens et de créer une garantie commune des dépôts bancaires pour éviter les fuites de capitaux. Mais ce shéma revient à demander à l’Allemagne de devenir la caution de dernier ressort de l’ensemble des pays européens, ce qui n’enchante pas Berlin.

Face à ce plan et aux critiques du nouveau gouvernement, Angela Merkel a répondu de manière très ferme en affirmant que « la médiocrité ne doit pas devenir l’étalon en zone euro » et que « les réflexions sur la mutualisation de la dette sont peut être dans l’intérêt de certains sur les marchés, mais elles mèneraient l’Allemagne à la médiocrité ». Pour elle « financer la croissance avec de nouvelles dettes, ce n’est pas viable ». Le point de non retour est proche.

Une union totalement ingérable

vendredi 15 juin 2012

L’ombre du Front National


Certes, Marine le Pen a largement battu Jean-Luc Mélenchon et le Front National a fait un de ses meilleurs scores, mais, avec 13% des voix le 10 juin, le parti d’extrême-droite a signé un score nettement en-dessous de ses espoirs du 22 avril et valide au contraire la théorie du plafond de verre.

Un semi-échec et une tentation

Le FN a fait moins qu’en 1997 et à peine plus qu’en 1993, de même que Marine Le Pen n’a gagné qu’un peu plus de 2 points par rapport au score de son père en 1995, faisant moins que le cumul de Jean-Marie Le Pen et Bruno Mégret en 2002, malgré un contexte économique et politique bien plus porteur. Bref, le Front National, s’il est revenu à son étiage le plus haut, n’est pas parvenu à casser le plafond de verre qui est le sien depuis des années et qui semble toujours aussi solide.

Bien sûr, certains se sont émus du comportement d’une partie de l’UMP et ont affirmé que les digues entre la droite républicaine et l’extrême-droite seraient rompues. Alors que beaucoup de dirigeants de droite affirmaient préférer voter socialiste plutôt que FN, l’UMP refuse aujourd’hui de choisir, reprenant le « ni-ni » mitterrandien, certains allant même jusqu’à préférer le noir au rose. Mais cette tentation a toujours existé, et elle était allée plus loin hier qu’aujourd’hui.

Bref, les digues continuent à tenir, même si elles sont plus chahutées qu’il y a cinq ans. Nous ne sommes pas comme en 1988, quand la droite avait carrément passé un accord électoral avec le FN dans le Sud-Est ou comme en 1998 quand des présidents de région UDF avaient été élus avec les voix du Front National. Si l’UMP regarde davantage à sa droite, nous n’en sommes pas encore au point où nous en avons été dans le passé. Et c’est bienheureux vu la réalité de ce parti.

Le gaullisme n’est pas soluble dans le FN


Retour sur l’affaire Trierweiler


En parler ? Ne pas en parler ? Au début, je ne souhaitais pas m’exprimer sur ce qui est sans doute devenu l’événement politico-médiatique de l’entre deux tours. Mais aussi dérisoire soit-il, l’importance prise par cet épisode amène à en tirer quelques leçons, comme Philippe Bilger.  

Vaudeville à l’Elysée

En un mois à peine, Valérie Trieweiler est parvenue à faire regretter Carla Bruni, qui avait su conserver la réserve que commandait sa position. En quelques mots, elle a provoqué une déflagration politique majeure dont nul ne sait si elle ne pourrait pas en partie modifier les résultats du second tour de dimanche. Il est bien évident que si le Parti Socialiste venait à ne pas obtenir la majorité absolue à l’Assemblée Nationale, que promettent les sondages, tous les regards pointeraient vers elle.

Il est proprement stupéfiant que la compagne de François Hollande n’ait pas saisi l’énormité de son geste de soutien à l’adversaire de Ségolène Royal alors que le président avait fait l’inverse en vue de ce second tour difficile face à ce dissident du parti socialiste. Bien sûr, l’ancienne candidate socialiste de 2007 a été imposée dans cette circonscription sans consultation des militants, mais ce n’est pas la première fois, ses racines sont proches et elle préside la région.

Mais surtout, ce soutien affiché publiquement au dissident opposé à l’ex-compagne du président est totalement ridicule. C’est une vraie faute politique, et si Valérie Trierweiler n’est pas une femme politique, son statut de journaliste politique fait qu’elle ne pouvait pas ignorer les conséquences potentielles de son geste, à moins de poster sans réfléchir, ce qui serait peut-être encore pire. Même Le Monde lui a fermement conseillé de quitter le réseau social.

Les leçons d’un dérapage

jeudi 14 juin 2012

2012, ou la victoire, temporaire, du bipartisme


Dimanche, la France devrait élire une Assemblée où seulement deux partis devraient très largement dominer l’hémicycle, comme jamais auparavant. Si le mode de scrutin porte une part de responsabilité, le cycle politique dans lequel nous nous trouvons est également en cause.

Quand l’UMP et le PS écrasent tout

Au second tour, les différentes projections n’accordent que moins de 10% sièges aux partis autres que le Parti Socialiste et l’UMP. Et encore, la plupart de ces circonscriptions devraient être gagnées par des partis qui ont un accord formel avec le PS, qui leur a réservé des sièges et leur a donné le précieux label majorité présidentielle tout en refusant d’investire un candidat socialiste : c’est ce qui va permettre aux écologistes, au PRG et au MRC d’avoir des élus le 17 juin.

Hormis ces trois partis, le Front de Gauche est le seul mouvement qui aura un nombre significatif d’élus. Et encore, il devrait perdre quelques sièges. Le Modem risque d’être totalement annihilé, à commencer par son chef. Le Front National pourrait avoir un ou deux élus, mais ce n’est pas encore fait. Seul Debout la République semble avoir l’assurance de retrouver son président à l’Assemblée Nationale, étant donné que Nicolas Dupont-Aignan a réuni 43% des suffrages dimanche.

Un tel résultat peut paraître surprenant tant les Français ont été déçus des précédents gouvernements UMP et PS. Néanmoins, après 10 ans d’opposition, les socialistes se sont refaits une forme de virginité politique qui peut expliquer que l’espoir de changement repose sur leurs épaules. Et cela s’explique aussi parce que le Modem a complètement échoué à se différencier solidement et que les autres grandes alternatives restent confinées aux marges de la vie politique.

Quelle alternative pour demain ?

mercredi 13 juin 2012

Espagne : le énième plan qui ne résout rien


Madrid devrait donc être la 4ème capitale européenne à recevoir une « aide » européenne pour traverser la crise provoquée… par les politiques européennes. Ce 7ème plan (Athènes en étant déjà au 3ème depuis cet hiver) ne devrait pas être le dernier, comme le souligne Jacques Sapir.

Madrid dans l’impasse européenne

Le cas de l’Espagne est extrêmement paradoxal, comme je l’ai déjà souligné plusieurs fois. Voici un pays qui était donné en exemple à toute l’Europe par la Commission et les défenseurs myopes du néolibéralisme. Forte croissance, budget excédentaire (de 2005 à 2007), plus faible dette publique de l’UE. Tous les clignotants étaient au vert pour qui regardait les indicateurs économiques de manière superficielle. En réalité, l’économie espagnole dépendait de la bulle immobilière.

A un moment, le pays construisait plus de logements que la France et l’Allemagne réunies. Les autorités espagnoles avaient bien tenté de limiter ces excès en mettant en place des normes bancaires contra-cycliques, mais cela n’était pas suffisant face à des taux d’intérêt beaucoup trop bas imposés par la monnaie unique. Et la bulle a également affaibli la compétitivité du pays, accru ses déficits extérieurs, faisant reposer son économie sur l’apport grandissant de capitaux étrangers.

Bref, cette croissance était artificielle, permise et encouragée par la monnaie unique, alors que le maintien de la peseta aurait sans doute permis de largement limiter la bulle (les investisseurs étrangers auraient été alors plus réticents à investir des capitaux qui pouvaient être dévalués, et le crédit aurait sans doute été plus cher). Sans possibilité de dévaluer pour relancer son économie, l’Espagne tente de rééquilibrer ses comptes par une austérité qui plonge son économie dans la récession.

Un énième plan qui ne règlera rien

mardi 12 juin 2012

Les leçons du premier tour


Si le résultat du vote du 10 juin ne représente pas un triomphe pour le gouvernement, il n’en représente pas moins un véritable succès, illustré par la réussite des membres du gouvernement, quasiment tous en ballotage favorable, au contraire de nombreuses personnalités.

Vers une Assemblée rose

L’UMP avait fait semblant de croire à la possibilité d’une cohabitation, démentant les propos qu’ils tenaient eux-même entre l’élection présidentielle et les élections législatives de 2007, mais les Français ont préféré, comme toujours, confirmé leur vote d’il y a un mois. Si le score très proche du Parti Socialiste et de l’UMP peut donner l’illusion d’un bon score pour la majorité sortante, la comparaison avec les chiffres de 2007 montre qu’il y a eu un vrai mouvement de balancier.

L’UMP et les divers droites perdent pas moins de 10 points, autour de 35%, quand le Parti Socialiste et ses alliés proches (MRC, PRG) en gagnent 7, avec le même score. Et cela ne compte pas les Verts. Du coup, le parti dirigé par Martine Aubry pourrait bien décrocher la majorité absolue seul et devrait au pire l’obtenir avec ses alliés écologistes. A priori, il y a peu de chances que la majorité présidentielle doive s’appuyer sur le Front de Gauche pour dépasser le seuil des 289 élus.

Le FN perd 3 millions de voix et 4 points, démontrant à nouveau la solidité de son plafond de verre, démentant les pronostics sur sa dédiabolisation, même si Marine Le Pen peut espérer l’emporter à Hénin Beaumont. Il faut noter que le FN fait moins qu’en 1997, et à peine plus qu’en 1993… Le Modem s’effondre, à 2%, divisant par presque 5 le score déjà décevant de François Bayrou à l’élection présidentielle, qui était déjà deux fois inférieur à celui de 2007.

Sale temps pour les personnalités

lundi 11 juin 2012

Législatives : une confirmation sans enthousiasme


Hier, nous votions pour le premier tour des élections législatives. Les résultats démontrent que les Français, s’ils confirment le vote de l’élection présidentielle, le font sans grand enthousiasme, comme le démontre le niveau élevé de l’abstention, au-delà de 40%.

Une mauvaise campagne

La campagne présidentielle n’avait déjà pas été brillante, entre un François Hollande qui s’était contenté du service minimum, en comptant sur le rejet du président sortant pour l’emporter. Nicolas Sarkozy, en menant une campagne très clivante, a paradoxalement réussi à remobiliser une partie de son électorat, outré par les réactions agressives que suscitaient le président, du fait même de la tonalité très droitière de sa campagne, comme l’avaient analysé Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin.

Là, les partis ont donné dans le service minimum. L’UMP s’est cantonnée à une opposition outrancièrement caricaturale, après avoir constaté le 6 mai que la polarisation pouvait lui permettre de sauver les meubles. Résultat, le moindre fait et geste du gouvernement est attaqué sans la moindre nuance, du décalage de l’horaire de l’annonce du gouvernement, à la cérémonie du passage de pouvoir ou l’excès de vitesse de la voiture du président, cédant souvent à une outrance ridicule.

Le gouvernement n’est pas exempt de critiques non plus, entre quelques annonces mal organisées et une insistance parfois également caricaturale sur le caractère « normal » de cette présidence, soulignée par une attention assez stupéfiante aux moyens de transport de l’équipe au pouvoir. La chronique de ces premières semaines est ainsi dominée par ce résumé un peu dérisoire de notre vie politique alors que la crise de l’euro dure depuis plus de deux ans.

Un choix par défaut

dimanche 10 juin 2012

Europe : le grand dilemme de l’Allemagne


The Economist a mis en couverture cette semaine un dessin où on voit un bateau qui représente l’économie mondiale s’enfoncer dans l’eau avec une phrase « Pouvez-vous démarrer les moteurs maintenant, madame Merkel ? ». Un résumé un peu simpliste du dilemme de nos voisins.

Le paradoxe de l’euro outre-Rhin

Le passage à la monnaie unique européenne, qui n’était pas souhaité en Allemagne, et qui est regretté en majorité aujourd’hui, a été extrêmement ambivalent pour Berlin. D’une part, ce pays, grande puissance exportatrice, est entrée dans cette union à un cours élevé (après les derniers ajustements monétaires), ce qui a poussé le pays à bloquer les salaires pour retrouver sa compétitivité, pénalisant pendant longtemps sa croissance et le niveau de vie de sa population.

Oui, les Allemands ont fait de gros efforts pour soutenir leurs entreprises exportatrices, sur lesquelles repose leur économie. Mais dans un régime de monnaie unique européenne, comme on pouvait le pressentir dès les années 1990, cet ajustement provoque un gain permanent, qui ne peut pas être effacé par des dévaluations si vos voisins conservent un taux d’inflation des salaires supérieur au vôtre, ce qui permet de gagner commercialement.

Résultat, l’Allemagne fait sa croissance au détriment de ses partenaires européens qui voient leur déficit vis-à-vis de la première économie du continent s’envoler. Cette situation est extrêmement malsaine car la croissance allemande dépend de l’achat à crédit de produits allemands par les consommateurs italiens, espagnols, grecs ou français. Et comme on ne peut pas s’endetter toujours plus ad vitam aeternam, la situation finit par se bloquer, ce qui est le cas depuis 2 ans et demi.

A pile ou face ?

samedi 9 juin 2012

Boissons énergisantes : quand l’Europe tue ?


« Vraisemblable à très vraisemblable » : c’est ainsi que l’Agence Nationale de Sécurité Alimentaire a qualifié le lien entre deux crises cardiques ayant provoqué un décès et la consommation de boissons énergisantes ! Retour sur une libéralisation contestable venue de l’Europe.

Danger au rayon soda ?

Longtemps, la France a résisté à la commercialisation du Red Bull, l’AFSSA brandissant le principe de précaution pour refuser à la célèbre marque aux taureaux ailés de commercialiser son cocktail de sucre, de taurine et de caféine. La polémique a rebondi cette semaine, comme le rapporte Le Monde, avec « deux nouveaux décès par crise cardiaque en lien avec la consommation de boissons énergisantes »  selon l’Agence de sécurité sanitaire pour l’alimentation (Anses).

Ces deux cas viennent s’ajouter à d’autres puisque depuis 2008, et l’autorisation de la commercialisation de la célèbre boisson en France, « 24 (ont été) rapportés, treize pour lesquels un lien de causalité possible ou probable a pu être établi ». Bref, tout ceci pose un vrai problème car il est gênant de constater que la surveillance de la commercialisation de ses boissons semble indiquer qu’il pourrait y avoir un risque à les consommer en excès, surtout avec de l’alcool.

Ne faudrait-il pas privilégier  le principe de précaution, comme cela était le cas avant la décision de 2008 et mener des études plus approfondies avant d’autoriser de telles boissons, ou alors, imposer une diminution drastique ou même une suppression des substances qui font polémiques, comme la taurine ? Pourquoi laisser vendre des produits dont l’innocuité ne semble pas aussi incontestable qu’elle devrait l’être, et que les autorités sanitaires françaises refusaient d’autoriser…

Libéralisation et Europe

vendredi 8 juin 2012

18 propositions concrètes pour réguler la finance

La violence de la crise aurait dû provoquer une remise en question du système. Paradoxalement, la rapidité du sauvetage et les moindres conséquences de la crise par rapport à celle de 1929 font que rien n’avance. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir les solutions en main.
Des intellectuels alternatifs se sont levés
Venus de toutes les familles de pensée, de la gauche (Frédéric Lordon, Jacques Généreux, Emmanuel Todd, Jean-François Kahn sur son blog dans un très bon papier), du libéralisme humaniste (Jean-Luc Gréau, Maurice Allais), du libéralisme étasunien (Paul Krugman, Joseph Stiglitz, Robert Reich) ou d’ailleurs (Jacques Sapir, Paul Jorion), un nombre toujours plus important d’économistes et d’intellectuels nous proposent des solutions pour refonder le système économique. Je vous propose ici les 18 mesures emblématiques que j’ai retenues. Oui, un autre monde est possible !
Assurer une meilleure contribution de la finance à la collectivité
1.   Confier à nouveau la création monétaire à l’Etat : il n’est pas normal que les banques puissent aujourd’hui emprunter à 1% auprès des banques centrales pour prêter ensuite aux Etats entre 3 et 7%. L’Etat doit reprendre le contrôle de la création monétaire et retrouver la possibilité de monétiser sa dette s’il le souhaite, en revenant sur la loi de 1973. Cela sera sans doute la solution pour éviter une dépression en Europe.
2.   Instaurer une taxe Tobin significative (0.1 à 1%) sur toutes les transactions financières : cela permettra de faire davantage contribuer le monde financier à la collectivité tout en réduisant la spéculation à court terme, dont les coûts seront alors démultipliés. En outre, cela permettrait de réduire le fardeau des dettes contractées par les Etats pour sauver le monde de l’implosion financière.
3.   Instaurer une taxe sur les fusions et acquisitions : les rachats d’entreprise sont souvent l’occasion pour les actionnaires d’extraire toujours plus de valeur sous la forme de licenciements. Ce coût pour la collectivité devrait être compensé par une taxe exceptionnelle fonction du montant de la transaction, ce qui limiterait également les rachats d’entreprise à l’utilité douteuse.
4.   Créer un grand pôle public bancaire : aujourd’hui, les immenses profits des activités de détail des banques en France et dans le monde montrent que cette activité est un oligopole absolument pas concurrentiel qui vit telle une sangsue sur le dos de l’économie réelle et de ses clients. L’Etat pourrait instaurer une plus grande concurrence en créant une grande banque publique (autour de LCL ?) qui proposerait ses services à des tarifs raisonnables.
5.   Mettre fin à la course sans fin et mortifère à la rentabilité : hier, il fallait dégager 5% de rentabilité sur capitaux investis, aujourd’hui 15%, demain 25% ? Pour éviter que les fruits de la croissance ne soient totalement vampirisés par les actionnaires, comme le recommande Frédéric Lordon, nous pouvons mettre en place un SLAM (Shareholder Limited Authorized Margin), une limite au-delà de laquelle l’Etat taxe de manière confiscatoire (90% par exemple) toute rémunération supplémentaire, à la manière de Franklin Roosevelt.
6.   Encadrer strictement les bonus : quand tout va bien, les banquiers touchent des bonus colossaux et quand tout va mal, ils sont aidés par l’Etat et si leurs bonus sont réduits, il n’en reste pas moins très confortables. Il faut donc instaurer une nouvelle tranche d’IR pour les très hauts salaires (au-delà de 500 000 euros), et systématiser l’étalement du paiement du bonus ainsi que la possibilité de bonus négatifs.
Réellement encadrer le système financier
1-   Séparer à nouveau les banques de dépôt et d’affaires : pour protéger les banques de dépôt des excès des marchés, la Grande Dépression avait enfanté le Glass Steagall Act. Son abrogation par l’administration Clinton porte une lourde part de responsabilité dans la crise et il faut donc revenir dessus.
2-   Interdire toute transaction avec les paradis fiscaux : les normes de l’OCDE sont une sinistre plaisanterie. Les paradis fiscaux ont simplement conclu des conventions de partenariat avec quelques micro-Etats pour échapper à l’opprobre international. Pourtant, au moins à l’échelle européenne, un véritable blocus permettrait de mettre fin à ces trous noirs de l’argent sale et du moins-disant fiscal.
3-   Remettre en place un contrôle des mouvements de capitaux : la crise asiatique nous a enseigné que les pays qui encadrent les mouvements de capitaux sont moins sensibles aux crises financières. L’anarchie financière fait que les errements du marché immobilier étasunien sème la désolation sur la planète entière. Comme dans les bateaux, il est donc crucial de compartimenter les cales en remettant des frontières financières pour éviter qu’une seule voie d’eau ne menace de faire couler à elle seule l’économie mondiale.